Sur la page d’accueil de la Fondation Orange, un « bonjour 2021 » et une présentation magnifique pour des causes magnifiques (autisme, ateliers numériques, numérique solidaire, lutte contre l’illectronisme, etc, etc). Félicitations, sans rire, sans ironie ni acrimonie. Vraiment.
Simplement, en pleine pandémie, lorsque tant de jeunes scolarisés n’ont pas accès à Internet (0,5 de débit) ou lorsque mon voisin de 95 ans ne sait pas s’il pourra téléphoner à son médecin, l’effet d’annonce du site caritatif fait long feu. Ma voisine élue municipale a bien besoin de télécharger les PDF de la Préfecture. Tant que les fils abîmés ne seront pas changés, elle ne le pourra pas. Le Maire est injoignable, et tant que les fils abîmés ne seront pas changés, il le restera. Mes voisins, un couple de pompiers volontaires, ont besoin du téléphone. Tant que les fils ne seront pas changés, ils n’auront aucune garantie d’être joignables en cas de pépin. Etc, etc, vous connaissez la litanie, nous avons tous des dizaines d’exemples de ce genre illustrant les défaillances de l’opérateur.
Je l’ai déjà dit ici et j’y reviens : nous ne confondrons jamais la multinationale et les interlocuteurs auxquels nous avons eu affaire. Ils sont très bien et ont fait du mieux qu’ils ont pu avec les moyens du bord. Il est vrai que 6 techniciens pour toute la Drôme-Ardèche, c’est moyennement rigolo, avec les effets bien connus maintenant d’une sous-traitance qui posent pas mal de questions. Bref, nous les remercions derechef. Ils ont acquis la culture d’entreprise et la défendent. Il y a du participatif dans l’air et quoi de plus légitime ? A ceci près que cela leur devient visiblement difficile car ils ont affaire au même problème que les clients : une politique volontariste de désinvestissement massif en zone rural de la part de Orange, qui annonce fièrement sur le site précité : « Nous restons aux côtés de ceux qui en ont le plus besoin ». Cela en deviendrait presque indécent.
Botter en touche sur un programme sans précédent pour la 4G en zone rurale scintille sans doute aux oreilles des actionnaires comme les clochettes du Père Noël, mais reste très maladroit vis-à-vis des clients car, lorsque mes voisins ont réussi par miracle au bout de deux heures par jour pendant trois jours à avoir Orange au bout du fil, il leur a été répondu qu’ils n’étaient pas « éligibles » à une box 4G puisque « pas en zone blanche ». En effet, Orange considère que si la mairie n’est pas en zone blanche (un peu grise quand même…), tout le secteur ne l’est pas. D’un point de vue commercial, on marche sur la tête ! Faudrait-il contacter directement l’actionnariat ou la Commission Européenne pour alerter sur ces incongruités et leurs conséquences, car aucune réponse de Orange sur nos remarques à ce propos ?
Quant aux longues discussions qui radotent ici ou là sur la réparation des poteaux, que Orange et les autres opérateurs se débrouillent, nous n’avons que faire de ce marécage institutionnel et technique, nous voulons Internet auquel la Loi nous donne droit. Je rappelle ici que cette loi a été votée en novembre dernier. Réparer les poteaux ne suffit pas. Il faut changer les fils complètement fichus. A Eygluy-Escoulin, tous les poteaux au sol depuis 10 ans (10 ans !) ont enfin été réparés après un an d’acharnement. Merci Orange, mais maintenant il faut changer la ligne cuivre ! Et non, nous n’attendrons pas encore 10 ans pour la fibre. Tous les arbres ont été élagués, le fil circule correctement, mais il est en trop mauvais état pour assurer un débit suffisant.
Un demi méga de débit, ça rend têtu. Même si, comme le souligne le député Mr Saulignac suite aux démarches de la députée Mme De Lavergne, Orange se retrouve, de fait, en situation de monopole et l’État que ne soit pas en position de force. Nous sommes donc face à des multinationales qui dirigent la France. De quoi alimenter moult débats passionnants sur les histoires de souverainisme lors de commissions ad hoc, sans que cela n’arrange aucune de nos difficultés.
Deux questions se posent néanmoins.
D’abord, depuis quand l’État n’est-il plus en positon de force dans ce pays ? Simple question de volonté politique donc. Ensuite, même les capitalistes les plus ardents reconnaissent qu’une entreprise en situation de monopole a l’obligation d’agir dans l’intérêt du public et doit répondre de ses actes. Or, tout le monde voit clairement que dans les moments de crise, le service public reste encore la meilleure réponse.
Sur ce sujet, un autre site passionnant à consulter, celui de « Orange j’enrage », où les témoignages accablants s’accumulent, comme cette demande d’installation du téléphone fixe faite en mai 2020, toujours pas aboutie à ce jour, et une absence totale d’interlocuteur chez Orange, si ce n’est quelque SMS d’excuses robotiques…
Orange n’est donc pas présent sur nos territoires, et travaille très insuffisamment avec les élus, contrairement aux propos officiels. Je suis élu et la dernière réponse a été : « Mr Delforge, on ne pourra rien faire de plus, bonne journée ». Depuis, Orange est aux abonnés absents. Difficile à entendre quand les techniciens eux-mêmes nous disent qu’il y a plusieurs kilomètres de câble cuivre à changer. Mais en ont-ils les moyens ? Vraisemblablement pas. Devant cet inavouable et au fond des filets, on noie le poisson comme on peut, arguant d’une maintenance qui augmente de façon faramineuse tandis que les reportages sur les fils déchirés et traînant au sol sur des kilomètres se multiplient de façon tout aussi faramineuse.
Égaré dans les méandres de l’indéfendable, on nous fait même voyager dans l’espace-temps, en tentant de nous faire croire que c’est la fibre qui VA être installée (un jour..) qui a abîmé les poteaux. Quant aux fils qui ne se casseraient pas tout seul, on croit rêver quand on sait qu’ils ont été posés… …il y a 40 ans. Il est très dommage d’orienter ainsi le dialogue, car lorsque ce n’est pas le client qui se ferait bientôt admonester car il ne sait pas se servir de son téléphone ou de son ordinateur quand son téléphone et son service internet ne fonctionnent pas (cherchez l’erreur), ce serait du fait de propriétaires qui n’élaguent pas leur terrain, ou du chasseur qui envoie des plombs dans les fils, ou de la fibre qui sera posée dans 10 ans, ou des autres opérateurs. Alors nous posons cette autre question : à quand le retour de la station MIR ?
La multinationale Orange ferait donc mieux de revoir sa copie au chapitre « investissement en France » si elle veut garder sa position de leadership en quelque secteur que ce soit. S’arc-bouter sur la 4G n’y suffira pas. Il faut embaucher des permanents et investir.
Le député Mr Saulignac a raison. 2021 démarre donc par le regroupement de témoignages et l’interpellation contiguë de l’Arcep et de la Commission Européenne avec laquelle elle est appelée régulièrement à interagir.
En écho à mes articles précédents dans Le Crestois, en écho à notre « colère » relayée par notre députée Mme De Lavergne dans de nombreux médias.
En écho aux élus locaux et parlementaires du Gard, de la Corse, de la Lozère, de l’Ardèche et de la Haute-Loire, etc, qui nous rejoignent, et ce n’est pas fini.
En écho aux habitants d’Eygluy-Escoulin qui ont bien l’intention de rester au-dessus du radar en 2021 tant que la question du fil cuivre ne sera pas discutée, car nous sommes toujours enclins à discuter, et le café sera toujours proposé aux techniciens quand ils viendront.
Alain Delforge
Il n’y a donc plus de cours de droit ni d’histoire à l’ENA ? En 1960 la ligne téléphonique était un droit transmissible par héritage, au même titre qu’un caveau de famille. Apparemment pour le téléphone cela s’est (discrètement) arrêté et nos énarques ont remplacé de dispositif par un autre plus lucratif : la ligne n’est plus transmise (elle n’est même plus réparée) et il ne reste aux héritiers qu’à honorer les prélèvements. Autrement dit, pas de dépenses, rien que des recettes. Autre temps, autres moeurs…..
Mais je me demande si ceci est bien légal et même si c’est conforme à la constitution puisque la République, c »est-à-dire nous, possède 23 % du capital d’Orange.. Comment le PDG d’Orange peut-il se permettre d’envoyer au bain son actionnaire de référence ?
Il est vrai qu’en 1960 Stéphane RICHARD président d’Orange, et Emmanuel MACRON président d’une partie des Français n’étaient pas nés; et au bénéfice du doute ils sont légitimement en droit de dire qu’ils ne savaient pas qu’il y a eu un état de droit en France et qu’ils ne peuvent donc pas en connaître certains aspects.